Elle se sera fait attendre. Demandée par des eurodéputés dont le français Pascal Durand depuis 3 ans et soutenues par les organisations de protection des animaux, la création d’une commission d’enquête parlementaire sur le transport des animaux vivants a enfin été adoptée par le Parlement européen le 18 juin dernier, à 605 voix pour contre 53 voix opposées et 31 abstentions. Retour sur cette étape importante vers une meilleure protection des animaux pendant le transport.
Une commission d’enquête demandée de longue date
Le règlement européen 1/2005 sur la protection des animaux vivants pendant le transport établit des règles pour protéger les animaux qui sont transportés vivants. Malheureusement, ce règlement est mal appliqué et l’application n’est pas harmonisée entre les États membres de l’Union européenne (UE). Les organisations de protection des animaux dénoncent depuis de nombreuses années, vidéos à l’appui, les conditions parfois indignes dans lesquelles les animaux d’élevage sont transportés pendant de longues heures.
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Grâce au travail des ONG, des eurodéputés ont été sensibilisés au sujet et ont à leur tour sensibilisé leurs collègues pour demander une commission d’enquête parlementaire. En 2018, malgré le soutien de 220 eurodéputés, la conférence des Présidents, qui choisit les sujets qui vont être discutés par le Parlement en séance plénière, n’a pas souhaité inscrire cette commission d’enquête à l’ordre du jour et a décidé à la place de soumettre au vote la rédaction d’un rapport de mise en œuvre de la réglementation européenne sur le transport d’animaux vivants. Cette action, bien qu’adoptée par le Parlement, n’était pas satisfaisante car elle ne bénéficie pas de pouvoirs d’enquête aussi étendus qu’une commission d’enquête parlementaire.
Un espoir pour les animaux transportés vivants
Finalement, avec le renouvellement du Parlement, l’engagement de la Commission européenne à réviser la réglementation sur le transport d’animaux vivants et la pression citoyenne toujours plus forte sur le sujet, le Parlement a adopté à une immense majorité la création d’une commission d’enquête parlementaire. Elle aura pour but d’examiner la responsabilité de la Commission européenne et des États membres dans la mise en œuvre de la réglementation et dans ses lacunes. Cela va permettre de déterminer les dispositions qui doivent être modifiées car inapplicables et ne permettant pas de protéger les animaux correctement.
En pratique, cette commission d’enquête devrait démarrer après la rentrée parlementaire de septembre 2020. Elle sera composée de 30 eurodéputés, répartis proportionnellement selon la taille des groupes politiques au sein du Parlement. Le groupe parti populaire européen (PPE) étant majoritaire, il aura le plus grand nombre de sièges (8). Malheureusement, ce groupe conservateur n’est pas le plus favorable au bien-être animal. Il faudra plutôt compter sur les autres groupes politiques plus intéressés par ces questions (comme les Verts ou la gauche unitaire européenne/gauche verte nordique).
Les eurodéputés membres de la commission d’enquête pourront aller aux postes de contrôles aux frontières de l’UE, aux ports de départ des navires bétaillers, et se rendre compte par eux-mêmes des problématiques majeures rencontrées par les animaux au cours du transport.
L’enquête durera 12 mois. Le rapport d’enquête sera publié probablement au cours du dernier trimestre de 2021, à la même période que les résultats de la Commission européenne sur le processus d’évaluation de la législation sur le bien-être animal pour déterminer si elle est adaptée aux objectifs. Cette évaluation annoncée lors de la publication de la stratégie « de la Ferme à la Fourchette » (voir page 8) examinera aussi l’efficacité de la réglementation sur le transport, laquelle sera nécessairement révisée comme l’a annoncé la Commission européenne. Les résultats de la commission d’enquête viendront donc s’ajouter à l’évaluation par la Commission européenne et permettront d’étayer clairement les problématiques du règlement 1/2005 et les moyens d’y remédier.
Conclusion
Cette commission d’enquête sur la protection des animaux pendant le transport arrive à point nommé avec l’engagement de la Commission européenne à réviser le règlement sur le sujet. On peut y voir une victoire des citoyens et des ONG qui n’ont pas ménagé leurs efforts pour démontrer les problèmes de protection animale pendant le transport depuis plusieurs années. La LFDA va suivre ce processus de près et apportera son expertise lorsqu’elle le pourra, dans le but d’obtenir d’abord un rapport juste et précis sur l’état de la situation et ensuite une réglementation qui prend réellement en compte le bien-être des animaux transportés.
Nikita Bachelard