CR: Haïkus et tankas d’animaux

Ouvrage collectif coordonné par Georges Chapouthier, illustrations Aurélia Colombet et Daniel Cardona, Éditions Pippa, Paris, 2020, 110 pages (16 €).

Cet ouvrage conjugue poésie et sensibilisation à la cause animale, nous faisant prendre conscience de notre devoir moral envers les animaux.

Poésie japonaise animal

Cet ouvrage collectif coordonné par Georges Chapouthier, biologiste et philosophe également connu en poésie et ici sous le pseudonyme de Georges Friedenkraft, est un délice poétique à mettre entre toutes les mains. D’abord, il redonne sa place à un genre littéraire insuffisamment représenté en France, pourtant ancestral en Asie. Ensuite, il met en avant des sujets de société chers à la LFDA puisque tous les haïkus et tankas présentés évoquent les animaux et leurs contextes de vie heureux ou malheureux. Enfin, il fait vibrer autour des animaux un souffle léger de poésie au cœur duquel les mots dansent tels de fines libellules à la fin de l’été.

nuit blanche
le cri de la chouette
transperce le silence
Nicole Pottier (p.40)

Pour rappel, le haïku, l’un des genres poétiques de la littérature japonaise classique, est un « petit poème de dix-sept syllabes, en trois vers (respectivement de 5, 7 et 5 syllabes) », à ne pas confondre avec le tanka, également représenté dans l’ouvrage, qui est une « forme poétique japonaise classique de 31 syllabes soumises à l’alternance 5-7-5/7-7 ». Ici, peu de mots mais une sémantique précise, un message fort, une poésie aux associations d’idées efficaces, une brièveté lexicale qui pourtant frôle l’éternité de la pensée humaine. Avec les haïkus et tankas, on ne s’embarrasse pas de verbiages ni de syntaxe alambiquée, on vise une esthétique poétique minimaliste qui atteint son but à tous les coups.

quatre perdrix
dans le sentier
coup de carabine
Claude Rodrigue (p.84)

Après la préface de Georges Chapouthier, qui rappelle que les animaux sont peu présents habituellement dans les haïkus en langue française (p.8), un public divers et de tous âges, allant de poètes reconnus à des enseignants ou encore de jeunes élèves de classes de 6ème, 5ème et CP, s’adonne à cette poésie pour notre plus grand émoi.

tous deux endormis
mains au clavier lui sa patte
dessus ma souris
Diane Descôteaux (p.12)

L’ouvrage est subdivisé de manière à entrer dans les groupes zoologiques sous différents titres de chapitres « Horizons de chats » (p.11), « Horizons de chiens » (p.17), « Brèves de la ferme » (p.23), « Paysages de mammifères » (p.27),  « Sonorités de plumes » (p.35), « Envolées d’oiseaux » (p.43), « Rêveries à sang froid » (p.51), « Envols de papillons » (p.53), « Bruits d’arthropodes » (p.56), « Moments d’insectes » (p.59), « Frontières invertébrées » (p.67), « Parenthèses d’humour » (p.73), « Appel à la biodiversité » (p.79), « Drames et douleurs » (p.83), « Empathies » (p.88), « Tankas de classes de 5ème » (p.90), « Poèmes d’élèves de 6ème  (p.92), « Haïkus des élèves de CP » (p.96). Cette diversité d’entrées est parsemée de sublimes illustrations d’animaux réalisées par Aurélia Colombet et Daniel Cardona qui rappellent les dessins naïfs du Petit Prince et offrent à cette anthologie un parfum d’innocence teintée de vérités.

bord du caniveau
deux tâches rouges
sur son pelage blanc
Franck Vasseur (p.84)

On retrouve ici la sensibilité et les combats de Georges Chapouthier : dans sa préface, parlant des animaux, il rappelle qu’« il importe en effet de savoir comment nous, humains, devons traiter ces êtres sensibles et souffrants qui partagent avec nous la planète et dont certains nous ressemblent tant » (p.10)… La lecture de ces haïkus et tankas ne manque pas, en effet, de nous faire prendre conscience de la beauté et de la fragilité de la faune qui nous entoure et que nous avons toutes et tous pour devoir moral, éthique et déontologique de protéger et de préserver aujourd’hui plus que jamais.

Koala surpris
Eucalyptus enflammés
Sanglots d’un enfant
Nadia Esteba (p.86)

Astrid Guillaume

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