Billet du président • revue n°118 (été 2023)
La corrida, acte barbare, perdure, mais ce n’est que partie remise
La corrida est d’abord pour moi un souvenir personnel : à mes débuts dans l’Administration, j’ai fait un stage de huit mois au cabinet du Préfet du Gers et je fus obligé en raison de mes fonctions d’assister à une corrida.
La vision de la longue et douloureuse mise à mort des taureaux, celle du public qu’enthousiasmait ce spectacle, m’ont soulevé le cœur. La mémoire de ce jour est toujours présente.
Cette torture et cette mise à mort considérées comme un spectacle me font penser à cet autre spectacle qu’autrefois un public rassemblant toutes les classes de la société regardait avec avidité, celui de la torture et de l’exécution des condamnés. La torture perdura en France jusqu’en 1780 et l’abolition de la torture par Louis XVI ; les exécutions capitales jusqu’en 1939, dès lors faites à l’abri des murs d’une prison jusqu’à l’abrogation de la peine de mort en 1981.
La LFDA s’est engagée, dès son origine, sous l’impulsion de Jean-Claude Nouët, dans le combat contre la corrida. Elle diffuse une remarquable brochure qui met en lumière la torture raffinée et cruelle que subit l’animal, torture qui a pour objet à la fois de susciter son agressivité et de réduire sa capacité de résistance et de défense.
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En 2023, nous avons soutenu l’initiative législative d’Aymeric Caron pour interdire la corrida en France – cette proposition étant soutenue par 74 % des Français (sondage Ifop pour Le Journal du Dimanche, 2022), et 32 % des résidents des communes où la corrida est pratiquée (sondage Ifop pour Sud Radio, 2022).
Cette proposition n’est pas venue au vote en raison de l’obstruction de différents parlementaires.
Je suis convaincu que ce n’est que partie remise : les mesures justes finissent toujours par l’emporter, telle la reconnaissance de la sensibilité des animaux par le code civil, pour laquelle la LFDA s’est battue pendant de longues années.
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Il reste qu’il est désolant que cet acte barbare, dont la cruauté est reconnue par la loi, perdure, qu’il soit exécuté devant des enfants et qu’il se trouve un public pour en applaudir le déroulement.
Louis Schweitzer