La hausse de la consommation de poissons à l’échelle mondiale, la pêche intensive et le réchauffement climatique, sont les raisons principales qui causent aujourd’hui de réels dégâts sur nos océans.
Ne plus chaluter à plus de 600 m de fond
C’est le conseil pratique que l’on peut tirer d’une récente étude écossaise pour préserver la faune marine profonde qui commence aussi à s’épuiser et maintenir une pêche raisonnable, au terme d’une analyse des captures de pêche scientifiques effectuées entre 1978 et 2013 dans l’Atlantique nord-est, entre 240 m et 1500 m de profondeur. Cette étude montre qu’il existe un seuil situé entre 600 et 800 m de profondeur au-delà duquel toute pêche commerciale est injustifiable pour 4 motifs :
- La capture commerciale d’espèce de grandes profondeurs dont le cycle de reproduction est extrêmement lent aboutirait à terme à la disparition de ces espèces.
- Les requins d’eaux profondes constitueraient près de 50 % de la composition de ces captures au-delà de ce seuil de profondeur.
- De 600 à 1300 m, la proportion des rejets d’espèces non ciblées quintuple.
- Enfin, la valeur du coup de chalut reste constante entre 700 et 900 m avant de baisser jusqu’à 1300 m.
En France, Scarpêche, la filiale du groupe de grande distribution Intermarché est le dernier armement à cibler les espèces d’eaux profondes, en particulier le sabre, le grenadier et la lingue bleue. Elle s’est engagée depuis le début de l’année à ne plus chaluter au-delà de 800 m. Cela, hélas, ne suffira pas pour préserver la vie profonde marine dans les océans du globe.
L’Océan déjà vidé de la moitié de ses poissons
Surpêche, pollution changements climatiques : les océans se vident. Sur la base de l’évolution de l’indice Planète vivante des populations marine, le World Wild Life Fund (WWF) dans son dernier rapport montre que la population d’animaux marins dans le monde a diminué de 49 % depuis 1970. Certaines espèces ont même vu leur effectif fondre de près de 75 %. La mer Méditerranée, l’une des plus anciennes zones de pêche du globe qui fait vivre les gens depuis des siècles est présentée dans ce rapport comme étant sur le point d’être totalement vidée de ses poissons.
Aujourd’hui largement surexploitée, c’est à peu près 1,5 million de tonnes de poissons qui y sont pêchées chaque année, et 89 % des populations de poissons sont épuisées: le thon, le maquereau et la bonite sont particulièrement touchés. Dans le même temps à l’échelle mondiale, la consommation moyenne par habitant est passée de 9,9 kg à 19,2 kg en 2012. Le rapport note également que les récifs coralliens et prairies sous-marines pourraient disparaître du globe d’ici 2050 sous l’effet du réchauffement climatique.
Les experts de WWF jugent cette tendance accablante quand on sait que plus de 25 % de toutes les espèces marines y habitent. Que faire? Si l’on veut juguler cette désertification accélérée des océans, il faut rapidement rationaliser la pêche, réduire les rejets polluants en mer et dans l’atmosphère et développer les élevages de poissons d’eau douce herbivores.
Mais de nombreux obstacles, politiques économiques et sociaux sont à franchir et, comme chacun sait, ce ne sont pas les plus faciles quand les intérêts à court terme, nationaux, locaux ou corporatifs, se heurtent à l’intérêt planétaire à moyen terme.
Thierry Auffret Van Der Kemp