L’ordonnance du 7 octobre 2015 relative au commerce et à la protection des animaux de compagnie, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2016, modifie l’encadrement législatif des étapes élevage et vente de la filière. Certaines mesures devraient notamment permettre de lutter contre le trafic de chats et de chiens issus d’élevages douteux.
Une évolution satisfaisante des définitions de l’élevage et de la vente d’animaux de compagnie
L’élevage étant aujourd’hui défini par la détention de plusieurs femelles reproductrices donnant lieu à la vente d’au moins deux portées d’animaux par an1, l’ordonnance du 7 octobre 2015 abaisse le « seuil » à partir duquel l’activité est qualifiée d’élevage2: à compter du 1er janvier 2016, il suffira de détenir au moins une femelle reproductrice et d’en céder au moins un chien ou un chat à titre onéreux.
Par ailleurs, l’ordonnance clarifie la notion de vente d’animaux domestiques, faisant entrer dans la qualification toute cession à titre onéreux, et écartant expressément la condition relative à la détention de la femelle reproductrice dont l’animal est issu3. À ce jour, les articles L. 214-6 et suivants du code rural dans leur rédaction actuelle encadrent seulement « l’exercice commercial des activités de vente », qui n’est pas défini.
Cela permet ainsi de soumettre plus de situations aux obligations afférentes à ces activités, prévues par l’actuel article L. 2146 IV du code rural. Néanmoins, les éleveurs de chiens et chats ne cédant à titre onéreux pas plus d’une portée par an et par foyer fiscal seront dispensés de la déclaration préfectorale et de l’obligation de détenir un certificat de capacité.
En revanche l’obligation de mettre en place et d’utiliser des installations conformes aux règles sanitaires et de protection animale s’applique à toute situation d’élevage de chiens et de chats et d’exercice à titre commercial d’activité de vente d’animaux de compagnie. On peut toutefois regretter que, dans le cadre de l’élevage, le respect de ces obligations ne soit requis que lorsqu’il s’agit de chiens ou de chats et non d’animaux de compagnie en général.
L’immatriculation obligatoire des vendeurs et éleveurs
Outre le respect d’obligations déjà existantes4, l’activité d’élevage de chiens ou de chats et l’exercice à titre commercial de vente d’animaux de compagnie doivent désormais donner lieu à immatriculation (respectivement, déclaration de création d’une entreprise agricole auprès de la chambre d’Agriculture, et immatriculation au Registre du commerce et des sociétés).
Sous réserve du respect de certaines conditions, certains éleveurs de chiens ou chats inscrits au LOF et ne vendant pas plus d’une portée de chiens ou de chats par an et par foyer fiscal5 pourront néanmoins être exemptés de cette obligation. A priori, l’immatriculation devrait permettre une meilleure traçabilité de ces activités, ce qui constitue un enjeu majeur et positif pour la lutte contre le trafic d’animaux de compagnie. À nouveau, il semble néanmoins peu cohérent de réserver l’obligation d’immatriculation aux seuls élevages de chiens ou de chats, tandis qu’elle s’applique à l’activité de vente à titre commercial de tous animaux de compagnie.
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Les cessions d’animaux de compagnie mieux encadrées
Toute offre de cession devra désormais faire figurer, outre les informations déjà existantes6, ce numéro d’immatriculation
- ou le numéro de portée pour les éleveurs dispensés de l’obligation
- ainsi que le caractère de don ou de gratuité.
De plus, l’obligation relative à la transmission d’un certificat vétérinaire lors d’une vente de chien opérée dans le cadre des activités d’élevage, de gestion de fourrière ou de refuge, d’exercice à titre commercial de ventes, de transit, de garde, d’éducation, de dressage ou de présentation au public, s’appliquera désormais également à la vente de chats dans ces mêmes conditions. Ce même certificat vétérinaire, qui comporte certaines informations spécifiques7, devra désormais également accompagner toute cession de chat ou de chien lorsque celle-ci s’effectue en dehors des activités précitées8 .
Cette dernière obligation ainsi que l’interdiction de céder un chien ou un chat de moins de 8 semaines soulèvent cependant une interrogation pour leur application dans le cas de l’accueil temporaire d’animaux « trouvés », notamment pratiqué par de nombreuses associations et leurs familles d’accueil.
Dans un tel contexte, ces dispositions semblent peu appropriées: la cession à titre gratuit d’un chat ou d’un chien de moins de 8 semaines, dont le propriétaire est aux abonnés absents, par la personne qui l’a recueilli temporairement peut-elle entrer dans leur champ d’application ? Enfin, la vente en libre-service d’un animal vertébré est désormais interdite.
De plus, la condition d’âge minimum de 8 semaines pour les chats et chiens, existante pour les cessions à titre onéreux, s’applique désormais également aux cessions à titre gratuit. Ces dispositions doivent non seulement permettre de lutter contre les achats non réfléchis, aboutissant parfois à l’abandon de l’animal, mais également d’éviter la cession d’animaux non sevrés qui montreront à l’âge adulte des dysfonctionnements comportementaux directement liés à une séparation de la mère trop précoce.
Si cette disposition doit être saluée, le meilleur moyen d’atteindre les objectifs qu’elle poursuit serait encore d’adapter la condition d’âge aux caractéristiques biologiques réelles de l’animal, qui varient entre les espèces voire entre les races. Si ces mesures constituent une belle étape dans le domaine, il faut cependant observer que leur contrôle sera très lourd considérant la multiplication des offres sur internet, et qu’elles atteindront difficilement leurs objectifs en l’absence de moyens afférents.
Chanel Desseigne
- Article L 214-6 III du code rural, dans sa rédaction actuelle.
- Article 1 de l’ordonnance, modifiant l’article L 214-6 III du code rural.
- Article 1 de l’ordonnance, modifiant l’article L 214-6 IV du code rural.
- Prévues à l’article L 214-6 IV dans sa rédaction actuelle.
- Article L 214-6-2 II, article 1 de l’ordonnance.
- Article L 214-8 V du code rural.
- Listées à l’article D 214-32-2 du code rural.
- À ce jour, seul un certificat de bonne santé est requis pour la vente d’un chat lorsqu’elle est effectuée à titre onéreux; le certificat spécifique est requis, en revanche, pour toute vente de chien en dehors des activités citées.