Expérimentation animale à des fins cosmétiques

Le règlement (CE) n° 1223/2009 du 30 novembre 2009 relatif aux produits cosmétiques est censé avoir mis fin à l’expérimentation animale à des fins cosmétiques depuis le 11 mars 2009 pour la majorité des catégories d’expérimentation, et depuis le 11 mars 2013 pour les tests relatifs à la toxicité des doses répétées, à la toxicité pour la reproduction et à la toxicocinétique (1).

Cette interdiction, mise en œuvre par l’article 18 du règlement, se rapporte aux actes suivants :

  1. la mise sur le marché des produits cosmétiques dont la formulation finale, afin de satisfaire aux exigences du présent règlement, a fait l’objet d’une expérimentation animale au moyen d’une méthode autre qu’une méthode alternative ;
  2. la mise sur le marché de produits cosmétiques contenant des ingrédients ou des combinaisons d’ingrédients qui, afin de satisfaire aux exigences du présent règlement, ont fait l’objet d’une expérimentation animale au moyen d’une méthode autre qu’une méthode alternative ;
  3. la réalisation, dans l’Union, d’expérimentations animales portant sur des produits cosmétiques finis afin de satisfaire aux exigences du présent règlement ; 
  4. la réalisation, dans l’Union, d’expérimentations animales portant sur des ingrédients ou combinaisons d’ingrédients afin de satisfaire aux exigences du présent règlement.

Ce règlement exige également que les produits commercialisés sur le territoire de l’UE soient sans danger pour le consommateur. Ainsi, l’article 10 prévoit la réalisation d’une évaluation de la sûreté du produit cosmétique.

maquillage cosmétique

Depuis le 11 mars 2013, de nombreuses incertitudes persistent quant à la portée réelle de cette interdiction, en particulier concernant la possibilité pour les industriels de tester leurs substances sur les animaux dans des États tiers (2). Comme le souligne l’avocat général M. Michal Bobek, « s’agissant de l’interprétation du règlement sur les produits cosmétiques, l’adoption de l’interdiction de la mise sur le marché est manifestement le fruit d’un processus long et controversé. Le texte qui en est résulté ne brille pas par sa clarté ». 

La législation de certains États, comme le Japon ou la Chine, requiert que les cosmétiques soient testés sur des animaux comme condition de leur commercialisation sur leur territoire. Afin de maintenir l’accès à ces marchés lucratifs, certains industriels des États membres de l’UE continuaient de tester leurs produits en dehors de l’UE. Le 21 septembre, la CJUE s’est prononcée sur cette question. Dans cette affaire, une association professionnelle représentant les fabricants d’ingrédients retenait une interprétation littérale de l’article 18 b) du règlement (CE) n° 1223/2009 : selon eux, dès lors que l’intention de l’industriel est de se conformer à la législation d’un État tiers, par opposition aux dispositions du règlement, il n’y a pas lieu d’interdire la mise sur le marché. Cette association souhaitait connaître la position de la cour anglaise, qui a opéré un renvoi préjudiciel devant la CJUE.

Suite à une analyse littérale des termes du règlement, et téléologique (relative au but poursuivi par le législateur), la CJUE a décidé que « l’article 18, paragraphe 1, sous b), du règlement (CE) n° 1223/2009 du Parlement européen et du Conseil, du 30 novembre 2009, relatif aux produits cosmétiques, doit être interprété en ce sens qu’il peut interdire la mise sur le marché de l’Union européenne de produits cosmétiques dont certains ingrédients ont fait l’objet d’expérimentations animales hors de l’Union, afin de permettre la commercialisation de produits cosmétiques dans des pays tiers, si les données qui en résultent sont utilisées pour prouver la sécurité desdits produits aux fins de leur mise sur le marché de l’Union ».

Selon cette même décision, les tests sur les animaux sont considérés comme réalisés afin de satisfaire aux exigences du règlement n° 1223/2009 et d’obtenir l’accès au marché de l’Union lorsqu’ils sont invoqués dans le rapport de sécurité du produit cosmétique prévu par l’article 10 du règlement.

Cette décision représente une grande avancée pour les animaux de laboratoire utilisés à des fins cosmétiques et pour le consommateur. Néanmoins, l’utilisation du verbe « pouvoir » et le fait que l’interdiction soit conditionnée à l’utilisation des données résultant des tests pour l’évaluation de sûreté du produit (exigée par le règlement) incitent à la prudence concernant la portée de cette décision.

Katherine Mercier

  1. Règlement (CE) n° 1223/2009, considérant 43. 
  2. Une communication de l’ECHA avait déjà ébranlé la confiance des citoyens européens en révélant que de nombreux ingrédients de produits cosmétiques étaient testés au titre du règlement REACH. Au titre de REACH, seuls sont interdits les tests sur les animaux effectués à des fins exclusivement cosmétiques. Voir : ECHA/NA/14/46, 27 octobre 2014

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