Un congrès international réunissant treize organisations de protection animale s’est tenu à Bruxelles ; vingt-deux conférenciers sont intervenus à la tribune. Le congrès s’est conclu par une série de résolutions et de projets d’action de grande importance, concernant les points suivants :
- Protection des palombes, interdiction des lacets et de la tenderie, prohibition du trafic des petits oiseaux,
- prohibition de l’importation des oiseaux exotiques,
- protection des oiseaux contre la pollution des mers par les produits pétroliers,
- interdiction des loteries foraines d’animaux vivants,
- protection des reptiles, batraciens et mammifères insectivores,
- protection des espèces considérées comme « nuisibles » même localement ou temporairement,
- suppression de la chasse à courre,
- suppression des pièges et engins,
- propagande contre le commerce des fourrures,
- conservation des phoques et des baleines,
- extension de la loi de protection des animaux domestiques aux animaux en général.
Vaste et ambitieux programme de sauvegarde de la faune sauvage qui, réalisé dans son intégralité, pourrait régler nombre de problèmes encore très actuels. L’engagement de mettre en œuvre ce programme a été adopté à l’unanimité dans l’enthousiasme des résultats à en attendre.
Il reste hélas à dévoiler la date du congrès : il s’est tenu du 7 au 11 août 1935. Depuis 80 ans, rien n’a été fait, ou presque. Certes, on sait bien que quatre ans après de tels congrès sur la sauvegarde des espèces animales, les humains se sont uniquement occupés pendant six années de la destruction de leur propre espèce, et dans des proportions jamais encore atteintes, et que durant les dix années qui ont suivi, ils ont consacré leurs efforts à relever les ruines physiques et morales qu’ils avaient causées. Plus grave encore, la folie destructrice s’est étendue à la Planète, qui a été mutilée, appauvrie, fragilisée. La Terre qui nous porte aujourd'hui n’est plus que résiduelle, vestigiale. Les effectifs des espèces sauvages libres se sont effondrés, la crainte d’une disparition totale de nombreuses d’entre elles tourne désormais à la certitude. En un peu moins d’un siècle, Homo sapiens a ravagé la planète.
Ce qui était un espoir raisonnable en 1935 n’est plus qu’une folle illusion, issue d’un optimisme au final nocif, puisqu'il entretient cette illusion et évite (ou empêche) de prendre des décisions. Les quelques voix qui tentent de faire entendre la raison ne sont pas écoutées. Seule, une ultime, ferme, généralisée et très sévère politique de sauvetage pourrait peut-être ralentir la dégringolade. S’en être abstenu a conduit tout droit au cataclysme qui a commencé à se mettre en route. Alors, de l’Homo sapiens, caractérisé par le cerveau et la main, il ne restera, dans les derniers temps de son futur, que la mâchoire et un estomac affamé.
Article publié dans le numéro 97 de la revue Droit Animal, Éthique & Sciences.