La Cour des comptes, dans son rapport de février 2017, dresse un constat alarmant sur l’état financier du Parc zoologique de Paris et les conséquences sur sa pérennité.
Cette lecture est d’autant plus amère que les articles de Jean-Claude Nouët, Thierry Auffret van der Kemp, Jean-Jacques Barloy, Patrick Vassas ou Forian Sigronde Boubel, publiés dans la revue de la LFDA, constituaient des mises en garde. Les auteurs émettaient des doutes sur l’intérêt, tant sur un plan scientifique, éthique ou financier du projet de rénovation du Parc zoologique de Paris dont certains médias ou politiciens avaient fait un cheval de bataille…
Nous ne reprendrons pas les arguments développés dans les articles précités, nous invitons le lecteur à les lire ou à visiter le site de la LFDA pour en appréhender les développements et mieux comprendre le pourquoi de l’opposition aux zoos, dont en particulier celui de Paris.
Le rapport de la Cour des comptes confirme en tous points les craintes émises dans ces articles de la revue de la LFDA voilà déjà plus de 10 ans. Il constate en effet que les hypothèses de fréquentation du public ont été largement surestimées. L’objectif de fréquentation par les études préalables réalisées en 2005 par un cabinet spécialisé était de 1,4 million de visiteurs/an. Un rapport de circonstance ? Pour l’année 2015, un an après sa réouverture, 912 000 visiteurs ont visité le Parc zoologique, chiffre décevant, puisque le Parc zoologique bénéficiait de l’attrait de la nouveauté.
Ces chiffres s’expliquent en partie par un prix du billet d’entrée jugé élevé par le public. Le parti affiché était de « privilégier » le bien-être animal. Souci louable, mais illusoire dans un zoo, lequel, par sa nature même (et contrairement à ce qui est dit au public) ne peut en aucun cas proposer des conditions similaires à celles du cadre de vie réel des animaux. Le parti était aussi de restreindre le nombre d’espèces, souci tout autant louable, mais qui a déçu les visiteurs qui espéraient plus d’animaux à contempler.
Les campagnes publicitaires et les différentes formules d’accroche (parrainage d’animaux, nocturnes, événementiels, etc.) menées depuis l’ouverture pour augmenter la fréquentation du site n’ont pas eu les effets escomptés et ne pourront pas les avoir.
Les chiffres sont implacables et les faits sont têtus.
Ainsi, pour la période 2017-2020, la Cour des comptes estime que le coût annuel du Zoo pour le Muséum s’élèvera à 20 millions d’euros, dont 6,8 millions de dépenses de fonctionnement et 13,2 millions au titre de la redevance. Les recettes de 2015 ne se sont élevées qu'à 12,6 millions d’euros.
Le ministère de tutelle, pour éviter une cessation de paiement, a versé en 2015, une dotation globale exceptionnelle de 9 millions d’euros pour le Parc zoologique de Paris, le déficit structurel de ce dernier étant estimé à une moyenne de 1,2 million d’euros.
Rappelons que la funeste procédure PPP (Partenariat public privé), qui a été adoptée pour ce projet, comme pour bien d’autres, a été présentée comme la solution miracle, au dire de nos gouvernements successifs. Elle s’appliquera avec toute sa rigueur : la redevance, incluant le remboursement de l’investissement, frais de fonctionnement et divers, devant être versée pendant 25 ans au titulaire du marché.
Il est regrettable que les suggestions de transformer la parcelle de 14 hectares en réserve florale, ornithologique ou piscicole, plutôt qu’en zoo, n’aient pas été suivies d’effet. Les contribuables comme les animaux, y auraient trouvé leur compte.
L’occasion était unique de s’honorer que Paris, enfin, n’ait plus de zoo, cette prison pour des animaux qui n’ont pas demandé à être enfermés ni regardés par un public abusé sur l’intérêt de la démarche. Mais il est des lobbys puissants…
Plus d’une décennie s’est écoulée depuis la campagne menée par certains groupes de pression et politiciens pour la réaffectation de la parcelle en zoo.
Mais jamais les tentes des sans-domiciles fixes n’ont quitté les abords du Parc zoologique de Paris, sans que les autorités s’en émeuvent… Des humains qui auraient souhaité être à l’abri, quand les animaux, eux, rêvent d’être dehors. N’y a-t-il pas de quoi se scandaliser que parmi les bailleurs de fonds initiaux ait figuré la Caisse des dépôts et consignations, qui a parmi ses vocations premières la construction de logements sociaux, et la Caisse d’Épargne, dont le rôle essentiel réside dans les « missions d’intérêt général », l’« engagement en faveur de la solidarité », et la « cohésion sociale » ?
Mais il est vrai que l’adage « quand le fric passe, l’animal trépasse », est une fois de plus vérifié…
Patrick Vassas, Philosophe désabusé
Article publié dans le numéro 99 de la revue Droit Animal, Éthique & Sciences.