La Déclaration universelle des droits de l’animal, corédigée par la LFDA, a été proclamée solennellement le 15 octobre 1978 à la Maison de l’Unesco à Paris. Elle constitue une prise de position philosophique sur les rapports qui doivent désormais s’instaurer entre l’espèce humaine et les autres espèces animales. Son texte fut actualisé 1989 puis en 2018 pour devenir la Déclaration des droits de l’animal.
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PRÉAMBULE
Considérant que la Vie est une, tous les êtres vivants ayant une origine commune et s’étant différenciés au cours de l’évolution des espèces,
Considérant que tout être vivant possède des droits naturels et que tout animal doté d’un système nerveux possède des droits particuliers,
Considérant que le mépris, voire la simple méconnaissance de ces droits naturels provoquent de graves atteintes à la Nature et conduisent l’homme à commettre des crimes envers les animaux,
Considérant que la coexistence des espèces dans le monde implique la reconnaissance par l’espèce humaine du droit à l’existence des autres espèces animales,
Considérant que le respect des animaux par l’homme est inséparable du respect des hommes entre eux,
IL EST PROCLAMÉ CE QUI SUIT :
Article 1
Tous les animaux ont des droits égaux à l’existence dans le cadre des équilibres biologiques.
Cette égalité n’occulte pas la diversité des espèces et des individus.
Article 2
Toute vie animale a droit au respect.
Article 3
- Aucun animal ne doit être soumis à de mauvais traitements ou à des actes cruels.
- Si la mise à mort d’un animal est nécessaire, elle doit être instantanée, indolore et non génératrice d’angoisse.
- L’animal mort doit être traité avec décence.
Article 4
- L’animal sauvage a le droit de vivre libre dans son milieu naturel, et de s’y reproduire.
- La privation prolongée de sa liberté, la chasse et la pêche de loisir, ainsi que toute utilisation de l’animal sauvage à d’autres fins que vitales, sont contraires à ce droit.
Article 5
- L’animal que l’homme tient sous sa dépendance a droit à un entretien et à des soins attentifs.
- Il ne doit en aucun cas être abandonné, ou mis à mort de manière injustifiée.
- Toutes les formes d’élevage et d’utilisation de l’animal doivent respecter la physiologie et le comportement propres à l’espèce.
- Les exhibitions, les spectacles, les films utilisant des animaux doivent aussi respecter leur dignité et ne comporter aucune violence.
Article 6
- L’expérimentation sur l’animal impliquant une souffrance physique ou psychique viole les droits de l’animal.
- Les méthodes de remplacement doivent être développées et systématiquement mises en œuvre.
Article 7
Tout acte impliquant sans nécessité la mort d’un animal et toute décision conduisant à un tel acte constituent un crime contre la vie.
Article 8
- Tout acte compromettant la survie d’une espèce sauvage, et toute décision conduisant à un tel acte constituent un génocide, c’est à dire un crime contre l’espèce.
- Le massacre des animaux sauvages, la pollution et la destruction des biotopes sont des génocides.
Article 9
- La personnalité juridique de l’animal et ses droits doivent être reconnus par la loi.
- La défense et la sauvegarde de l’animal doivent avoir des représentants au sein des organismes gouvernementaux.
Article 10
L’éducation et l’instruction publique doivent conduire l’homme, dès son enfance, à observer, à comprendre, et à respecter les animaux.
Cette philosophie, qui s’appuie sur les connaissances scientifiques les plus récentes, exprime l’égalité des espèces face à la Vie. Elle propose à l’humanité les règles d’une éthique biologique. L’idée d’un égalitarisme universel n’est pas nouvelle : on la reconnaît dans des civilisations bien plus anciennes que la civilisation occidentale, et dans des religions bien différentes des religions judéo-chrétiennes.
Mais cette éthique devait être exprimée avec clarté et fermeté dans le monde actuel, déjà trop perturbé, menacé de destruction, et où violence et cruauté explosent à chaque instant. Si l’homme a pu établir peu à peu un code de droits pour sa propre espèce, il ne dispose cependant d’aucun droit particulier en regard de l’univers. Il n’est en effet que l’une des espèces animales de la planète, et l’une des plus récemment apparues.
La Vie n’appartient pas à l’espèce humaine. l’homme n’en est ni le créateur, ni le détenteur exclusif. elle appartient tout autant au poisson, à l’insecte, au mammifère, comme aux végétaux.
L’homme a créé dans le monde vivant une hiérarchie arbitraire qui n’existe pas naturellement, en ne prenant en compte que son usage propre. Cette hiérarchie anthropocentrique a conduit au spécisme, lequel consiste à adopter une attitude différente selon les espèces, à détruire les unes en protégeant les autres, à déclarer certaines “utiles” et d’autres “nuisibles” ou “féroces”, à réserver “l’intelligence” à l’homme pour n’accorder à l’animal que “l’instinct”. C’est le spécisme qui a conduit l’homme à penser que l’animal ne souffre pas comme lui-même, alors que tout ce que l’on sait actuellement démontre au contraire qu’il souffre physiquement comme nous, et que sa pensée, liée à la présence d’un système nerveux centralisé, est bien plus élaborée que les neurosciences ne le laissent encore entrevoir, ce qui l’amène à souffrir aussi psychiquement. Ces aptitudes confèrent aux animaux des droits particuliers, par rapport aux végétaux.
La Déclaration Universelle des Droits de l’Animal doit aider l’humanité à se retrouver en harmonie avec l’univers. Elle n’a pas pour but de lui faire retrouver le mode de vie des tribus primitives. Elle constitue une étape visant à amener l’homme au respect de la Vie sous toutes ses formes pour le bien de toute la communauté biologique à laquelle il appartient, et dont il dépend. Elle n’a nullement pour objet, et ne doit pas avoir pour conséquence, de faire oublier la lutte contre la misère humaine, contre la souffrance morale ou physique, contre l’égoïsme forcené, les internements politiques, les tortures. Au contraire, il s’avère que veiller au respect des Droits de l’Animal, c’est nécessairement veiller aussi au respect des Droits de l’Homme, car les uns sont inséparables des autres. C’est donc bien une philosophie, une éthique biologique, une conduite morale que la Déclaration Universelle propose à l’humanité, en conduisant celle-ci, par une réflexion et une profonde prise de conscience, à retrouver sa place parmi les espèces vivantes, et à s’intégrer à nouveau dans l’équilibre naturel, condition fondamentale de sa propre survie.
Cela signifie que l’espèce humaine doit modifier son mode actuel de pensée, et renoncer à l’anthropocentrisme, comme à tout comportement zoolâtrique, pour adopter enfin une conduite et une morale centrées sur la défense de la Vie, et donner la priorité au biocentrisme. C’est en cela que la Déclaration universelle des droits de l’animal constitue une étape importante dans l’histoire de l’intelligence humaine et de la morale.
À la protection de l’animal se substitue le respect de l’être vivant.
Les sources d’inspiration, l’histoire de la rédaction et de la proclamation ainsi que les effets et perspectives de cette Déclaration sont exposés dans l’article de Jean- Marc Neumann (juriste et ancien vice-président de la LFDA) : « La Déclaration Universelle des Droits de l’Animal ou l’égalité des espèces face à la vie« , publié in Animal Law Developments and Perspectives in the 21st Century. Dike, Zurich, 2012.