Le code civil assimile-t-il vraiment l’animal à une chaise?

Mise au point juridique de la LFDA

 

S’il est vrai que l’animal dans le code civil est placé dans les catégories des biens puisque, de fait,  les animaux peuvent être appropriés et commercialisés, le code civil n’assimile pas pour autant l’animal à un meuble, tel qu’utilisé dans le langage commun, au même titre qu’une chaise ou une table, contrairement à ce qu’affirment  certaines organisations de protection animale en France.

Il suffit en effet de lire attentivement  4 des articles du code civil, modifié depuis 1999, pour se convaincre aisément, même si l’on n’est pas  juriste, qu’il n’en est rien.

L’article 528 (cliquer pour lire son texte intégral) fait la distinction entre les animaux et les  corps inertes et les déclare en tant que biens  comme étant meubles par nature soit parce qu’ils se meuvent par  eux-mêmes, soit parce qu’ils peuvent être déplacés
Si l’on veut bien se rappeler de vieux cours de grammaire élémentaire, le mot meuble est ici employé non pas comme un nom substantif mais comme un adjectif qualificatif synonyme de mobile tout comme lorsqu ‘il est employé par exemple dans les expressions  géologiques «terrain meuble», «sol meuble» ou  «sédiment meuble». Un bien meuble n’est donc pas synonyme d’un meuble, au sens d’une pièce de mobilier telle une chaise, par exemple.

L’article 534 (cliquer pour lire son texte intégral) lève d’ailleurs sur ce point toute ambiguïté en dénommant «meubles meublants», les meubles destinés à l’usage et à l’ornement des appartements, comme par exemple les sièges ou les lits ou les tapisseries.

De plus, le code civil dans son article 522 (cliquer pour lire son texte intégral) et son article 524 (cliquer pour lire son texte intégral), distinguant de surcroît les animaux des objets,  considère que dans certaines circonstances les animaux peuvent être aussi des biens immeubles, c’est-à-dire  qui ne peuvent être déplacés, lorsque par exemple un troupeau  reste attaché au fonds d’une exploitation agricole constitué également de terres, de bâtiments et d’engins  ou encore lorsqu’il s’agit de  pigeons et de leur colombier ou d’abeilles et de leurs ruches. Là aussi le mot immeuble est un qualificatif, synonyme d’immobile ou immobilier mais pas d’un immeuble au sens d’un bâtiment.

Dès lors où les animaux domestiques ou sauvages captifs peuvent être appropriés et faire l’objet de commerce, ils ne peuvent être que des biens, même si ce sont des biens particuliers en raison de leur nature d’être vivants et doués d’une sensibilité particulière. 
A ce titre, la LFDA rappelle que c’est suite à  sa  demande de modification du code civil en vue de distinguer les animaux des choses, transmise au Garde des Sceaux en octobre  1995, que 4 ans plus tard, elle obtenait du gouvernement par les articles 24 et 25  de la loi relative à la protection des animaux n° 99-5 du 6 janvier 1999 (6) la distinction aux articles 524 et 528 du code civil entre les animaux les corps inertes et les objets, tels que les chaises.
La LFDA œuvre depuis 15 ans pour que le code inscrive et définisse explicitement aussi la nature et la sensibilité particulière des animaux, sur lesquelles cette distinction est fondée.

Notons enfin qu’il est possible d’utiliser une chaise comme bon nous semble pour autant que nous en soyons propriétaire et que son usage ne soit pas dangereux pour autrui : nous pouvons par exemple la briser (sauf sur le dos d’autrui),  la scier  en  mille morceaux, l’utiliser comme escabeau en montant  dessus ou  nous en servir comme tablette même si elle est prévue pour s’asseoir. 
Par contre et fort heureusement, lorsqu’il s’agit d’un animal, même lorsqu’il nous appartient, à la différence de nos autres biens nous ne pouvons pas légalement l’utiliser à notre gré, nous devons l’entretenir et épargner à son bien-être toute atteinte évitable. De nombreuses dispositions du code pénal et du code rural et de la pêche maritime ainsi que des arrêtés ministériels  interdisent de le maltraiter ou de le mettre à mort sans nécessité et édictent des normes spécifiques de bien-être pour différentes catégories  d’animaux que ce soit pour leur  l’élevage, leur garde ou leur transport ou leur abattage.

Afin d’harmoniser entre eux code civil, code rural, code de l’environnement et code pénal pour rendre en particulier plus efficace l’application des dispositions protégeant les catégories animaux, scientifiquement reconnues comme aptes à éprouver des sensations douloureuses, des atteintes évitables à leur bien-être, la LFDA a rédigé et remis fin 2013 aux services juridiques du Président de la République, un projet de proposition de loi qui ne ne bouleverse pas l’agencement des codes.Toute proposition de changement radical du statut juridique de l’animal, surtout dans le contexte socioéconomique actuel, serait en effet à l’évidence rejeté par les politiques et risquerait de provoquer pour longtemps l’immobilisme sur le sujet. Le projet de la LFDA, en cours d’examen par l’État, propose simplement d’introduire la définition des animaux et de la sensibilité particulière de certains d’entre eux, avec pour conséquence des correctifs ou des compléments à seulement quelques articles déjà existants de chacun de ces codes. Les modifications proposées sont de nature à lever toute ambiguïté ou incohérence des textes vis à vis du bien-être et de la sensibilité des animaux, y compris des animaux sauvages vivant en liberté, et à renforcer quelques unes des sanctions prévues pour les atteintes injustifiées au bien-être ou à la vie d’un animal La LFDA propose entre autres dans cet esprit que le code civil précise désormais que « Les animaux, qui ne sont pas des choses par leur nature d’êtres vivants et/ou par leur qualité d’êtres sensibles à la douleur, sont des biens particuliers. Les droits relatifs à leur propriété, à leur usage et à leur cession sont par conséquent limités par des textes spécifiques visant à assurer leur entretien, leur bien-être, à respecter leur sensibilité particulière, ainsi qu’à préserver leurs espèces ou leurs races lorsqu’elles sont menacées. »

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