Les animaux sont-ils des hommes comme les autres ?

Sous ce titre, l’hebdomadaire La Vie du 26 juillet 2007, publie une enquête de Chloé Andries, sous forme d’un dossier de 6 pages confrontant  les points de vue de scientifiques, de philosophes et de juristes, parmi lesquels Georges Chapouthier, vice-président de la Fondation la Ligue française des droits de l’animal,  Pascal Picq, membre de son  comité d’honneur et Suzanne Antoine, membre de son conseil  administration.

[…] « L’homme ne serait-il qu’un animal comme un autre ? Pour Georges Chapouthier, neurobiologiste, directeur de recherche au CNRS, la frontière est floue, mais elle existe bel et bien. La spécificité de l’homme réside dans sa complexité. Il se distingue non par ce qu’il a, mais par l’utilisation complexe qu’il en fait. Grâce à un cerveau extrêmement performant, l’homme est capable de se projeter dans l’avenir, de développer un sens aigu de la liberté et de la morale. Pour lui, l’homme doit absolument assumer ces deux facettes : l’une animale, l’autre non. C’est en assumant ses deux visages qu’il se sentira d’avantage responsable de son environnement, sur lequel il a un dangereux pouvoir de manipulation grâces à ses aptitudes techniques. A ce titre, le scientifique défend l’idée d’assurer une protection des animaux, qui passerait par la création de droits propres aux animaux, tout en affirmant la primauté du droit humain en cas de conflit fondamental (comme l’atteinte à la vie). Un point de vue qu’il développe au sein de la LFDA (Ligue française des droits de l’animal), association de scientifiques, de juristes et philosophes qui militent pour leur donner des droits.

[…]On ne peut calquer le droit de l’homme sur les animaux, affirme Suzanne Antoine, juriste et auteur d’un rapport sur le statut juridique de l’animal commandé en 2005 par Dominique Perben, alors garde des Sceaux. Toutefois, pour la juriste, la législation actuelle est insuffisante. Il existe une incohérence entre le code civil, qui assimile l’animal à un bien meuble (un objet), et les codes pénal et rural qui le protègent. Il faudrait donc un système juridique cohérent, qui le considère comme un être sensible. 

[…] Pascal Picq, paléoanthropologue, maître de conférences au collège de France, [livre aussi son point de vue dans ce dossier] ».

Avec l’animal, l’homme pratique un grand écart schizophrénique au quotidien. D’un côté, nous ne supportons plus de voir souffrir les animaux que l’on maltraite pour nos loisirs ou notre consommation. Pour nous rassurer, nous les considérons donc comme des machines, lorsque la science a bien montré que cette position est intenable. De l’autre côté, nous traitons nos animaux de compagnie comme des membres de la famille et projetons sur eux des qualités humaines, qui leur créent des pathologies. En témoigne l’augmentation des cas de chiens qui attaquent leurs propres maîtres. Mais cette tendance à la projection n’a rien à voir avec le fait de vouloir mieux les protéger. Je ne comprends pas cette phobie qui nous fait craindre qu’en donnant des droits aux animaux ces derniers ne menacent l’identité de l’homme. Le devoir ne concerne que l’homme, qui protège l’animal comme un objet. Or le droit permet de mettre l’homme en relation avec l’animal, l’engageant à le protéger en tant qu’être sensible. C’est un engageant moral à protéger les plus faibles qui ne peuvent s’exprimer. Mais cela fait peur à ceux qui confondent le droit avec la revendication, comme si les animaux, avec des droits, auraient des revendications.

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