- Le site internet de la chaîne de télévision réunionnaise Antenne Réunion publie sur son site internet quelques lignes le 8 octobre 2014 sur le cas de Tommy le chimpanzé, pour qui l’avocat américain Steven Wise demande la reconnaissance d’une » personnalité » juridique.
Contacté par téléphone à propos de ce cas, notre ancien directeur à la retraite, Thierry Auffret van der Kemp répond : « La législation aux Etats-Unis concernant la protection animale est quasi inexistante […] et la maltraitance animale ne concerne que les animaux domestiques. […] Le cas de Tommy est plus de l’ordre de la communication que pratique (sic) ».
- L’hebdomadaire Réforme du 27 juin 2013 publie un dossier « Conditions animales » dans lequel Louis Fraysse, recueille notamment les avis de deux biologistes, Thierry Auffret Van Der Kemp, directeur de la LFDA et de Georges Chapouthier, administrateur de la LFDA, sur l’approche rationnelle de la question des droits de l’animal.
» […]L’écart entre notre attachement pour certains animaux et notre indifférence manifeste envers les autres a amené un auteur à parler de « schizophrénie morale » pour caractériser notre rapport aux bêtes : nous traitons inégalement des espèces finalement très semblables, ne serait-ce que d’un point de vue biologique. En réaction, un nombre croissant de militants envisagent la question animale dans sa globalité, et plaident pour une reconnaissance juridique du statut des animaux. […] les débats […] ont pour point de départ la reconnaissance de la souffrance endurée, principe premier de l’éthique animale.
« A partir du moment où l’humain a des devoirs qui l’obligent à ne pas faire souffrir les animaux, cela implique que ces derniers possèdent des droits, estime Thierry Auffret Van der Kemp, zoobiologiste marin, directeur de la fondation Droit animal, éthique et sciences (LFDA). Il ne s’agit évidemment pas d’octroyer par exemple le droit à l’éducation aux animaux, mais de respecter leur droit à vivre décemment et à ne pas souffrir. »
Dans sa réflexion, la LFDA se fonde sur les avancées de la science, et notamment de l’éthologie, la science des comportements des espèces animales en leur milieu naturel. Celle-ci a relevé ces dernières années des capacités d’intelligence insoupçonnées chez de nombreuses espèces. La LFDA revendique en outre une approche « rationnelle » de la question, en opposition à une approche jugée trop sentimentaliste chez les défenseurs des animaux en France. Mais dans notre pays, le fait de mentionner l’octroi de droits pour les animaux ne passe pas. Encore plus que la défiance, c’est l’ironie qui est de mise. […]
« Toute découverte scientifique implique des conséquences sur le plan éthique, note Thierry Auffret Van der Kemp. Si l’on parvient à prouver l’existence de la souffrance des animaux, cela signifie qu’il faut remettre en question la façon dont nous les traitons, voire dont nous l es considérons. Cette remise en cause de comportements millénaires entraîne souvent un déni, qui peut se traduire par de l’ironie.
Un autre moyen d’esquiver le problème est l’usage du « sophisme du pire », selon l’expression du philosophe Jean-Baptiste Jeangène Vilmer. Il consiste en l’assertion commune selon laquelle les défenseurs des animaux seraient mieux inspirés de s’occuper, en priorité, de la misère humaine.
« Ces deux activités ne sont pas du tout incompatible, rétorque Thierry Auffret Van Der Kemp. Certains de nos membres s’impliquent également dans des organisations humanitaires. Dans les deux cas, il s’agit de combattre la souffrance. Et puis les accusateurs sont-ils des engagés bénévoles pour soulager la détresse des humains?
En France, l’animosité parfois viscérale manifestée à l’encontre des théoriciens des droits pour les animaux plonge ses racines dans notre tradition philosophique. La théorie de ‘l’animal- machine », chère aux cartésiens, a laissé des traces. […]
[De son côté], le philosophe et neurobiologiste Georges Chapouthier […] [en répondant à la question:] « En quoi la façon dont nous traitons les animaux en dit long sur nous les humains? « : [déclare] : »L’homme se pense en être moral. Cela se ressent dans son discours: dire d’une attitude qu’elle est « humaine » a une connotation positive, mais dire qu’elle est « bestiale » revient à exprimer l’inverse. Je suis persuadé que si nous améliorions la façon dont nous traitons les animaux, nos plus proches parents dans le monde naturel, toute notre société humaine en bénéficierait. Pour cela, il nous faut notamment tenir compte des avancées de la science. La capacité de l’animal à ressentir la douleur fait désormais consensus. Les découvertes de l’éthologie moderne montrent qu’à ces facteurs de douleur peuvent s’additionner des facteurs d’intelligence. Ce qui fait qu’enfermer un singe dans une cage trop étroite peut le rendre fou. Nous ne pouvons plus faire comme si nous ne savions pas. Gardons aussi à l’esprit que les découvertes de l’éthologie progressent à grands pas. Il nous reste tant à découvrir chez les animaux, dont nous avons certainement sous estimé l’intelligence ».
L’intégralité de cet article peut être consultée à l’adresse internet
http://www.reforme.net/une/societe/conditions-animales-schizophrenie-humaine
- Le mensuel franco japonais Franc-parler de janvier 2012 publie une interview de Georges Chapouthier, neurobiologiste, philosophe et administrateur de la Fondation LFDA qui répond à trois questions : « L’homme est-il un animal comme les autres ? « Est-il nécessaire de parler des droits de l’animal et de légiférer pour les protéger? » « Il y a t-il encore beaucoup à apprendre des recherches sur les animaux ? ».
- L’hebdomadaire Le Monde magazine du 17 septembre 2011 de son côté publie sous ce titre et sous la plume de Hubert Prolongeau, un dossier de 7 pages dans lequel Jean- Marie Coulon, premier président honoraire de la cour d’appel de Paris et administrateur de la Fondation LFDA, apporte son avis avec 4 autres personnalités.
[…] »Trois traités internationaux (Maastricht, Amsterdam, Lisbonne) ont reconnu des droits des animaux, mais le droit français est incohérent dans ce domaine. Le code rural reconnaît que l’animal est un être sensible et qu’il mérite » l’attention » et des décrets pris en Conseil d’Etat fixent les mesures propres à lui éviter des souffrances. Le code pénal reconnaît lui aussi les mauvais traitements aux animaux comme punissables et un article du code de procédure pénale accorde aux associations la possibilité de se constituer partie civile. Le code civil, en revanche, fixe l’animal dans un statut de bien meuble: il n’est considéré que dans la mesure où il appartient à l’homme. De plus, au nom de leur aspect culturel et traditionnel, des activités comme la corrida ou le combat de coqs bénéficient d’une sorte d’immunité légale, de contradiction avec l’esprit du code pénal. » Le domaine très délicat de l’expérimentation animale est lui aussi théoriquement limité par des dispositions qui en restreignent l’usage à la nécessité, et à l’utilisation du minimum d’animaux. « Le vrai problème, comme souvent en droit, est celui du contrôle. C’est assez commun en France avec l’application des lois. On en vote des tas mais rien ne suit. »
Mais jusqu’où ira le droit de l’animal? Verra-t-on un jour le droit du chien à mordre un enfant qu’il a asticoté? « Non je ne crois pas. L’homme restera toujours prioritaire. Mais il est acquis q’il ne faut pas infliger à l’animal une souffrance inutile. C’est un pas capital. Maintenant il faut améliorer la cohérence des textes et continuer de considérer que le droit des bêtes est un complément des droits de l’homme. L’animal est reconnu comme objet de droit. Pourra-t-il devenir un sujet de droit? C’est toute la question. »
Reste aussi à déterminer quel animal est concerné par ces textes.
« Pour l’instant cela se limite aux animaux vertébrés domestiques et tenus en captivité. Les animaux sauvages libres restent dans le non droit. » […]
- Sur le même sujet, dans le quotidien régional L’Essor Sarladais du 9 septembre, Georges Chapouthier, directeur de recherches du CNRS et administrateur de la LFDA répond à quelques questions.
« Le salon de l’agriculture de Cologne, en Allemagne, a souhaité interdire l’exposition et la vente de foie gras lors de sa prochaine édition en octobre. Qu’en pensez-vous?
» C’est bien ! Concernant tout ce qui est protection animale, l’Europe du Nord est en avance sur nous. Beaucoup des améliorations que nous avons eues ces dernières années viennent des directives de Bruxelles ».
Pourquoi cette avance ?
« En Europe du Nord […] il n’y pas la même conception d’une séparation entre l’homme et le monde animal. La culture n’est pas la même que dans les pays latins. J’aime beaucoup Descartes pour ses réalisations scientifiques. Mais l’influence philosophique du cartésianisme a été néfaste par chez nous. Le philosophe a développé le modèle de l’animal-objet. Il expliqua que l’animal était une entité du même ordre qu’une chaise ou une table. Il ne pouvait bien sûr avoir aucun droit. »
Quelle vision défendez-vous?
« L’animal n’est certes pas un être humain. Mais il n’est pas non plus un objet. Il doit être traité différemment. Notre code napoléonien propose deux entités les personnes et les biens. Nous proposons d’en créer une troisième spécifique aux animaux. La législation évolue peu à peu…L’homme doit s’imposer des contraintes pour ne pas faire n’importe quoi avec les animaux. Il faut les traiter décemment. Il faut leur octroyer des droits adaptés. Pas les mêmes que l’homme, évidemment! Mais ils doivent avoir le droit de vivre une vie conforme à leur espèce. J’ajoute que tout ce qui va dans le sens du respect de l’animal ira dans le sens du respect de l’homme et de la santé humaine. » […]
- Le mensuel TGV magazine d’octobre 2010, publie sous ce titre un article élaboré par Nadia Gorbatko sur la base d’un entretien avec Jean-Marie Coulon, magistrat, administrateur de la LFDA et auteur avec Jean-Claude Nouët du livre Les droits de l’animal aux éditions Dalloz.
[…] »En France, plusieurs textes protègent, en théorie, nos amies les bêtes. La loi du 6 janvier 199 sanctionne ainsi les atteintes sans nécessité à leur sensibilité, leur bien-être, leur vie ou leur intégrité, tandis que des décrets déterminent les mesures propres à leur éviter des souffrances, « lors des manipulations inhérentes aux diverses techniques d’élevage, de parcage, de transport et d’abattage ou d’expérimentation scientifique ». Le code pénal, de son côté, punit les « mauvais traitements »comme »les actes de cruauté » envers les animaux. Mais ces règles ne s’appliquent qu’aux seuls vertébrés domestiques et aux espèces sauvages apprivoisées ou tenues en captivité […]. En raison de coutumes d’ordre culturel, religieux ou agricole, nombre de pratiques continuent, par ailleurs, à bénéficier de dérogations. A commencer par la corrida et les combats de coqs: justifier d’une « tradition locale ininterrompue » suffit aujourd’hui à éviter toute poursuite…Les abattages rituels se trouvent dispensés de l’obligation d’étourdir les animaux avant leur mise à mort.Quant à l’écornage sans anesthésie des jeunes bovins ou à l’agonie par asphyxie des poissons d’élevage, pourtant reconnus comme des vertébrés sensibles, elle laisse la majorité des citoyens muette comme une carpe…On est loin des principes défendus par la déclaration universelle des droits de l’animal proclamée à l’UNESCO en 1978: Droit de ne pas être tué ou atteint dans son intégrité physique sans raison; droit au bien-être; droit pour toutes les espèces de ne pas disparaître par la faute de l’homme et droit de ne pas souffrir, pour les animaux dotés d’un système nerveux central et aptes à ressentir la douleur, la peur ou l’angoisse. « Chasseurs, agriculteurs, éleveurs…les lobbies restent puissants en Europe », commente Jean-Marie Coulon. « Même si la réglementation y montre une certaine avance, il reste beaucoup à faire, dans bien des domaines: l’expérimentation scientifique, la détenation, les transports, l’élevage en batterie… »
Encore faut-il savoir où placer le curseur et comment gérer les conflits entre droits de l’homme et droits de l’animal[…] Entre les tenants d’une conception radicale, prêts à renoncer à toute exploitation de l’animal sans discrimination d’espèce, et ceux d’une pensée libérale, inspirée par la vision cartésienne de l’animal-objet, la bataille est loin de s’achever. « Le sujet est important, c’est un vrai thème de société, comme le montrent les récents débats autour de la corrida », souligne Jean-Marie Coulon. « Pour éviter de verser dans une forme de systématisme, d’un côté ou de l’autre, je pense qu’il faut d’abord se recenter sur ce postulat: l’animal est un être vivant et sensible. Donner le primat aux droits de l’homme sur les droits de l’animal n’empêche pas de réduire les souffrances de ce dernier, de s’efforcer à faire sans faire mal… »